[Loiez Deniel nous explique le vlogging – la vidéo à l’heure des blogs, de YouTube et de DailyMotion – au moment même où les images subreptices de Ségolène Royal mettent la classe politique et les médias en émoi. Une excellente occasion de regarder plus en profondeur un mouvement intéressant.Chercheur indépendant dans les domaines de la poésie visuelle et des nouvelles technologies, Loiez est Président de Vidéoformes Festival International d’Art. Il a fondé la liste de diffusion FranceVloggingNous nous sommes rencontrés en ligne. Il a participé aux Skypecasts et nous éclaire souvent de ses commentaires. Je suis ravi de l’accueillir sur CaféTransnets.]

Ségolène Royale se fait piéger par une caméra aussi indiscrète qu’infidèle. Le bal du vlogging politique ouvert en France par Santini et repris quelques mois plus tard par le tandem Loïc Le Meur-Nicolas Sarkozy dans le style « je suis moderne mais à côté », prend son rythme de croisière.Tous les médias parlent aujourd’hui de l’incident créé par l’anonyme « Jules Ferry » qui a mis les images en ligne, et l’on pourra inscrire sur le calendrier du vlogging cette date comme l’émergence de ce nouveau média dans la communication politique. Un commentaire avisé dans la presse nationale titrait l’autre jour sur la prestation de F. Bayroux au Politic Show « Des petites phrases pour les grands médias, des grands discours pour les petits médias ». Il semble que la tendance vient de s’inverser et que l’on pénètre dans le côté obscur du vlogging.Mais qu’est ce que le vlogging ou vidéo blogging ?En regardant du côté des États Unis on s’aperçoit que la communauté des vlogueurs ne cesse de croître et de donner des signes forts de sa capacité à innover dans l’exploration de ce nouveau territoire. Fondée en mai 2004 par une poignée d’activistes, d’artistes et de précurseurs dans l’utilisation de la vidéo communautaire ce regroupement n’a cessé de voir apparaître de nouveaux talents et des audiences souvent remarquables dans des registres diversifiés.Si l’on connaît parfois le célèbre  » Rocketboom  » un daily show qui a pulvérisé les records d’audience et généré toute une multitude de clones dépassant souvent en qualité et inventivité leur « maître à vlogger » d’autres talents s’imposent dorénavant dans ce nouveau média.L’atypique artiste Charlene Rule qui annonce haut et fort « It’s not TV, It’s not Movie, It’s Vlogging » en distillant savamment des instantanés de sa vie quotidienne, BlipTV qui est sans doute aujourd’hui le meilleur service d’hébergement gratuit de vidéos et qui apparaît être le seul sur ce secteur à avoir intégré un véritable service sous licence CC, les animateurs du vlog « AliveinBagdad » qui ont remporté tous les suffrages lors de la première édition des Vloggies Awards et ont reçu l’hommage appuyé des vlogueurs lors d’une émouvante « standing ovation ».A ces quelques ténors s’ajoute une masse de passionnés et de défricheurs (près de 2.500) qui font vibrer la vlogosphère en une véritable énergie créative et ludique.Les raisons de ce succès ?Il existe dans ce mouvement une grande volonté de partage des techniques et des usages ainsi qu’une sincère solidarité comme peut en témoigner le soutien apporté au journaliste indépendant Josh Wolf actuellement incarcéré pour avoir refusé de remettre aux autorités fédérales des images qu’il avait tourné lors d’une manifestation du G8.Les vlogueurs utilisent toutes les ressources du web pour progresser (liste de diffusion, wiki, visioconférence) et sont naturellement curieux sur les formes que peuvent prendre leur art nouveau.Ici en Europe les chosent semblent plus ternes. Même si nos amis anglais sont très présents dans cette communauté (ils n’ont pas la barrière de la langue) il n’existe peu ou pas de mouvement similaire sur le vieux continent. Le collectif Vlogeurope tiendra prochainement sa convention à Milan, mais cela se fait surtout dans l’ombre du mouvement d’outre Atlantique.De manière assez étonnante la France qui pourtant connaît un grand nombre d’utilisateurs de la ressource vidéo n’a semble t-il pas encore réussi à faire émerger un tel courant communautaire centré autour du partage de l’information et des ressources.La forte présence et le succès de DailyMotion a t-il au final étouffé un mouvement naissant ou bien est ce plus simplement une question d’échelle ? Cent millions d’utilisateurs sur YouTube, un million pour DailyMotion… Il existe pourtant encore quelques niches dans ce gigantesque espace créatif.Le vidéoblogging est de toute évidence un média puissant, souple et évolutif, comment faire aujourd’hui pour le mettre au service de tous ? Peut-être que Madame Royal ou Monsieur Sarkozy (voir d’autres prétendants) seraient inspirés d’investir le territoire de Second Life où la fusion des mondes s’opèrent inéluctablement dans le silence des médias traditionnels.

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...