Ce billet est paru sur le site de SFR

Mes amis passionnés de technologies digitales ont du mal à me croire. Après quinze ans vécus sur les bords de la baie de San Francisco, à quelques encablures de la Silicon Valley, le manque de nouveautés a commencé à me peser…

Soyons précis : mon projet s’appelle Winch5 . Il s’agit d’une série de voyages, de boucles qui me permettront en dix mois de visiter plus de trente villes et de poser le pied sur cinq continents. Je réaliserai en fait deux tours du monde complets. L’un par le sud, de Rio de Janeiro à Johannesburg en passant, entre autres, par Jakarta et Mumbai. L’autre par le nord, de Moscou à San Francisco avec escales à Shanghai, Séoul, Tokyo et quelques autres. Mais je reviens à mon départ des États- Unis… La Silicon Valley n’est pas au mieux de sa forme. Ça commence à se sentir et à se dire. Les plus impatients des Américains venus au moment où l’effervescence était captivante ont commencé à repartir, pour des lieux plus tranquilles (et moins chers), comme l’Arizona, ou pour New-York. Dave Winer, par exemple, qui a joué un rôle clé dans l’invention des blogs et des flux RSS, est reparti pour la côte est. Quant au fond, les articles (parfois exagérés) sur « la mort de l’innovation » se multiplient. Les créateurs les plus originaux et les plus inventifs, ceux qui voulaient devenir milliardaires en changeant le monde, ont été remplacés par ceux qui n’ont envie que de faire beaucoup d’argent et très vite. J’ajoute, par souci de précision, que nous sommes aujourd’hui dans la deuxième phase du cycle web 2.0. Après les idées nouvelles (2004-2008), on est enseveli sous les répétitions. C’est là que le journaliste s’ennuie. Le déjà-vu étouffe l’émerveillement. Une nouvelle phase émergera sans doute, dans quelques années… mais c’est maintenant que partir autour du monde des innovations et des médias sociaux prend tout son sens. Je suis convaincu que les nouveautés viendront en grande partie d’ailleurs. Et pas seulement de Chine, d’Inde ou de Corée. Du Kenya, d’Indonésie ou du Brésil, des pays que nous ne connaissons pas si bien que ça.

LES IDÉES VIENNENT DE PARTOUT

Certains Américains (pas très nombreux) l’ont bien compris, Thomas L. Friedman du New York Times par exemple. Mais ils ont tendance à voir le monde (il serait plat selon ce chroniqueur) comme un espace de plus en plus homogène dans lequel ils s’efforcent de repérer ceux qui appliquent ou rêvent d’appliquer un modèle américain. Les financiers se chargent ensuite de les attirer vers la Silicon Valley. Je ne suis pas convaincu que le monde soit plat et si je conçois que nous nous ressemblons beaucoup quand, assis devant un ordinateur, nous écrivons grâce à un logiciel de traitement de texte, il me semble que nous avons de bonnes chances d’utiliser les médias sociaux de manière différente. La culture et les réalités sociales comptent encore. Je crois aussi que la créativité est la chose du monde la mieux partagée et que, dans un univers connecté, les idées peuvent venir de partout et se matérialiser dans plus d’un endroit. Mais je n’ai pas la preuve de cette intuition. C’est pourquoi j’ai décidé d’aller voir sur place, dans autant de villes que possible, ce qu’il en est. Je vous le raconterai dans de futures livraisons.

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...