Amoureux de nos smartphones nous avons quand même un inavouable reproche à leur faire : y rentrer du texte tient plus du chemin de croix que de la partie de plaisir. L’écran tactile est un délice, mais le clavier virtuel un calvaire. C’est ce qu’ont compris, dès 2008, quatre jeunes chinois issus des meilleures universités de Shanghai et employés dans les multinationales présentes sur place (Microsoft et Intel entre autres).Loin de protester ils y ont vu une opportunité, se sont attaqués au problème et ont trouvé la solution. Ils ont maintenant près de 70 millions d’utilisateurs dont plus des deux tiers hors de Chine.

Cootek.com
Premier apport, le « glissement prédictif » (predictive swiping). Connu des utilisateurs de téléphones Samsung et Motorola essentiellement (qui utilisent le produit développé par Swype Inc.) la technique de swiping consiste à glisser le doigt d’une lettre à l’autre au lieu de taper lettre par lettre. Ça va plus vite mais, comme le dit très justement Michael Wong, co-fondateur et PDG de Cootek.com, l’entreprise qui produit TouchPal, « au milieu d’un mot long on a souvent oublié où on en est ». Je viens d’acheter un TAB 2 à Hong Kong et piaffe contre les erreurs de ce système qui a pourtant ses avantages.Avec Curve, le nom donné à leur algorithme par l’équipe de Touchpal, on voir le mot correct s’afficher au bout de deux ou trois lettres dans la plupart des cas. Il a le mérite, en outre de comprendre le contexte et peut même prévoir les mots suivants. En gros – j’ai essayé – on se trompe moins et on va plus vite.Autre approche que j’adore pour sa simplicité : ils font un clavier correspondant au classique mais dans lequel les touches sont associées par deux. En deux ou trois pressions, le système comprend le mot et l’affiche. Là encore : plus précis et plus rapide. Et ça me semble plus facile que le système T9 des mobiles de base.Ils ont même un dictionnaire local téléchargé automatiquement quand on se déplace. Ça permet d’écrire les noms de rue de San Francisco (entre autres) à peine y a-t-on débarqué.La liste des astuces est trop longue pour que je la décrive complètement. Essayez vous mêmes. Le TouchPal Keyboard est disponible en 60 langues (les multilingues peuvent même les mélanger). En cinq minutes vous vous ferez une idée.Le clavier est accompagné d’une autre app, TouchPal Contact, qui permet de trouver plus vite adresses et numéros de téléphones. On peut associer des noms avec des « gestes » (gestures). Par exemple, si vous voulez appeler l’homme ou la femme de votre cœur vous en dessinez un sur l’écran et, quelques secondes plus tard, son téléphone se met à sonner. Délicieux.Pour le chinois, ils mélangent la phonétique (on tape le son de la première syllabe) et les premiers traits des caractères auxquels ils correspondent mais qu’on dessine avec le doigt sur l’écran. Ça gagne un temps fou.Voilà qui intéresse les 800 Millions de personnes (environ) qui dans le monde utilisent des écrans tactiles. TouchPal gagne du terrain malgré deux obstacles de taille. Swype a été acquise par Nuance (qui a aussi racheté les développeurs de T9), la société connue pour ses logiciels de reconnaissance vocale. Elle vient de lancer en juin une nouvelle version bien plus sophistiquée qui offre plus d’une analogie avec Touchpal. Elle a ses fans. Plus grave encore, Apple interdit l’installation de clavier ne lui appartenant pas sur les iPhones et autres iPads.En 2009 Touchpal a gagné le premier prix de l’innovation globale mobile décerné au Congrés mondial du mobile de Barcelone. Mais ça n’est pas la seule raison pour laquelle je vous parle de Cooltek.Lancée en 2008 la société illustre – ce dont on doute volontiers – que des startups innovantes naissent en Chine, qu’elles peuvent se lancer à l’assaut du monde dès leur naissance et gagner de l’argent de l’autre côté de la Grande Muraille. Malgré ses 70 employés et son développement à l’étranger, elle est à l’équilibre grâce à des contrats de licence avec les fabricants de mobiles qui pré-installent le clavier.Pour Wong, c’est de l’ordre de l’évidence. « Les Chinois ont été très innovants tout au long de leur histoire, » m’a-t-il expliqué. « En particulier quand il s’agit d’efficacité. Et sur ce marché nous avons un avantage parce que notre langue est très compliquée. Nous avons une capacité d’inventer de meilleures implémentations. »Depuis l’apparition des machines à écrire, les langues à alphabet comptaient sur une solution facile : le clavier. « Tout a changé avec les écrans tactiles, » explique-t-il. « Notre vraie innovation porte sur la simplification de l’expérience tactile. »Swype ou TouchPal ? Une grosse boîte américaine contre une startup chinoise. Ce genre de concurrence risque fort de se multiplier dans le futur proche.Afficher Pisani Winch 5 sur une carte plus grande

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...