La science fiction comme indice

Innovation et science fiction font bon ménage, mais nous n’en tirons pas toutes les bonnes conclusions. Notamment quand il s’agit de mesurer la capacité d’innover. Commençons par des exemples :

Deux savants de Harvard et du Massachussetts Institute of Technology viennent de découvrir une nouvelle forme de matière qui ressemble étrangement au sabre-laser imaginé par Georges Lukas pour Starwars. C’est Mikhail Lukin le professeur de Harvard lui-même qui explique « La physique de ce qui se passe dans ces molécules [réunies par le passage d’un photon] est semblable à ce que nous voyons dans les films ».

Fondateur et patron de Tesla (voitures électriques de haut niveau) et de Space X (programme spatial privé), Elon Musk – le nouveau Steve Jobs – s’inspire, lui du film Iron Man comme en atteste un échange de tweets avec le réalisateur. Dominic Basulto rapporte que, juste après l’annonce par Musk de son intention de réaliser une interface holographique pour fabriquer des pièces détachées de fusées, il a reçu une question de Favreau.

« Comme dans Iron Man ? » demandait le metteur en scène. « Ouais. Nous l’avons vu dans le film et l’avons réalisé », a répondu Musk, lui-même source d’inspiration pour le personnage Tony Stark.

Loin d’une série de hasards il s’agit de la confirmation d’une tendance maintes fois notée. Les exemples les plus populaires et les plus récents nous sont fournis par la série Star Trek, en particulier pour ce qui concerne la téléphonie mobile.

« Ainsi, » nous rappelle le site Poximamobile.fr, « dès les premiers épisodes […], en 1966, l’équipage de l’Enterprise était doté d’objets multifonctions portables. Qu’il s’agisse d’outils de communication, d’instruments scientifiques ou médicaux ou encore de traducteurs simultanés miniaturisés.

Plus près de nous, un blog du Wahsington Post n’a pas hésité à présenter l’iPhone5S comme « la version 1 du tricordeur ». Une position expliquée par la présence du M7, un capteur ultra puissant, capable de mesurer l’activité physique, alors que la caméra est assez précise pour détecter les lésions de la peau et les infections de l’oreille. Il en faut plus pour avoir un vrai tricordeur reconnaît Vivek Wandhwa, l’auteur du billet, mais « heureusement, des entrepreneurs et des scientifiques sont en train de les construire ».

Mon doute initial sur le fait que nous ne tirons peut-être pas toutes les conclusions utiles des relations incestueuses entre science-fiction et innovation m’est venue en lisant le billet de Dominic Basuto sur le site BigThing.com. Il suggère de prendre la production de films de science-fiction comme indice de la capacité à innover.

La preuve, souligne-t-il, le fait que la Russie redevient active dans ce domaine. La seule vertu de l’attention portée sur le nombre de brevets déposés est qu’il s’agit d’une donnée facile à trouver et à mesurer. S’en servir comme indice de la capacité à innover peut être une dangereuse source d’erreurs, notamment en France. Écoutons nos rêves.

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crédit photo : CC/Pascal

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...