Personne n’ayant réponse à tout, les grosses entreprises commencent à comprendre l’intérêt de chercher l’innovation à l’extérieur. Les formules ne manquent pas. Mais celle de Telefónica, l’opérateur espagnol (cinquième au niveau mondial) a le mérite d’aider les startups dans différents pays tout en lui permettant de choisir les meilleures.
Le dispositif mis en place s’appelle Wayra.org. C’est un ensemble de 13 accélérateurs appelés « académies » installés dans 12 pays :
- l’Espagne (Barcelone et Madrid)
- les plus gros d’Amérique Latine
- mais aussi Allemagne et Grande Bretagne.
« Nous sommes une sorte de département R&D externalisé qui ouvre des pistes sur l’open innovation et permet de détecter ce qui peut nous être utile, » m’a expliqué Julian Vinue, directeur du centre de Barcelone.
Lancé en avril 2011 – pour ouvrir aux meilleurs codeurs et entrepreneurs une alternative à l’immigration vers les États-Unis – le réseau a reçu plus de 20.000 candidatures et a hébergé ou héberge encore près de 300 startups. Elles sont 10 à Barcelone dont les fondateurs sont russes, portugais, indien, espagnol, basque et croate… entre autres. Tout ce joli monde travaille en anglais.
Pour les attirer Telefónica (dont la Fondation a participé au financement de mon tour du monde de l’innovation) offre une bourse de 40.000 euros. Elle est versée en deux temps et ceux qui n’avancent pas n’en reçoivent que la moitié.
Les élus gagnent l’accès pendant 11 mois à des bureaux spacieux avec lignes à très haut débit. Comme dans tous les accélérateurs inspirés de Y Combinator ou de Tech Stars, ils bénéficient de mentors choisis, de mises en relation avec avocats, conseillers financiers et toute la communauté nécessaire pour faciliter l’innovation.
Tous les centres sont conçus sur le même modèle. Chaque startup a un espace propre mais ouvert. Les séparations sont marquées par des sortes de grands cubes qui sont en fait des tableaux noirs sur lesquels tout le monde écrit, comme il se doit quand on veut encourager la créativité.
Au terme du processus les participants exposent leurs projets au cours d’un Demo Day devant investisseurs et journalistes. Les meilleurs ont droit à leur moment (bref) de gloire lors du Mobile World Congress de Barcelone.
En échange, Telefónica demande le premier droit de négociation quand les startups se lancent dans le grand monde. Elle peut prendre entre 5% et 10% du capital de la société.
La « première édition » de Wayra Barcelone a permis l’émergence, entre autres, de Marfeel, une entreprise d’adaptation de contenus pour iPad qui a reçu 1,5 Millions de dollars et de MintLabs qui fait des scans 3D du cerveau.
« C’est intéressant pour notre secteur e-Health et pour la gestion d’images, » m’a expliqué Vinue à propos de cette dernière. On voit bien comment de tels projets peuvent être utiles. « Mais nous nous intéressons à tout ce qui concerne les TIC en général et pas seulement à la téléphonie, » précise-t-il. « Ça peut représenter une ouverture future ou intéresser un de nos clients. »
Son patron, Gonzalo Martin-Villa, responsable de l’ensemble des académies, vient de déclarer qu’aider les startups « est une question de survie« . Ceux qui ne voient pas qu’elles sont une réponse à la vitesse des changements et à la montée irrésistible de l’économie digitale se préparent de sérieux ennuis.
Wayra m’a fait penser à Startup Chile, l’initiative du gouvernement chilien pour attirer des startupers du monde entier avec des bureaux et une bourse de 40.000 dollars. Les deux différences les plus importantes sont qu’il s’agit cette fois d’une initiative privée et non publique et qu’elle s’étend sur 12 pays. Mais les deux initiatives ont en commun d’avoir trouvé – pour un coût raisonnable – une façon de s’ouvrir à l’innovation foisonnante des startups tout en leurs étant utiles. Les municipalités peuvent parfaitement adapter un tel modèle à leur budget comme à leurs réalités locales.