On parle beaucoup de crowdfunding en ce moment. De qui s’agit-il?
Le crowdfunding, ou financement participatif, c’est l’innovation dans le financement de l’innovation.
Pour une fois, l’exemple vient de la politique. En 2004, Howard Dean, lors de sa campagne à la candidature pour la présidence des États-Unis, a réuni des millions avec des contributions de moins de 80 dollars en moyenne.
Aujourd’hui, les plateformes connues sont Kickstarter.com et Indiegogo.com aux États-Unis et KissKissBankBank.com en France. Les sites spécialisés se multiplient :
Je pense par exemple à DragonInnovation.com, pour le hardware, RealtyMogul.com pour l’immobilier ou StartACure.com pour le financement de la recherche de la lutte contre le cancer.
Ils drainent beaucoup d’argent : près de 6 milliards de dollars en 2013. Mais, risques et récompenses n’ayant rien à voir quand il s’agit d’aider au lancement d’un candidat politique, d’un gadget, d’un film ou d’une entreprise de construction on en est venu à distinguer quatre types de crowdfunding en fonction de la rétribution reçue (ou pas) par celui ou celle qui met de l’argent au pot :
- le don,
- la récompense non financière,
- le prêt,
- et la participation au capital (equity crowdfunding).
En quoi la distinction est-elle importante?
Ce qu’il y a de merveilleux avec le don et la récompense non financière – comme par exemple la publication du nom au générique d’un film ou l’invitation à la première – c’est qu’ils permettent à plein de gens / sans fonds propres / de réaliser leur rêve. Et les « financiers » ne courent pas grand risque puisqu’ils ne demandent pas grand chose, voir « rien » en échange. Mais les deux dernières modalités sont source de préoccupation de la part des autorités.
- D’une part elles doivent protéger les investisseurs lambda susceptibles d’être trompés par ce que les Américains appellent les « vendeurs d’huile de serpent » en souvenir des charlatans qui en faisaient un remède miracle au moment de la conquête de l’ouest.
- D’autre part elles sont également soumises aux pressions des banques qui se sentent menacées par cette innovation perturbatrice.
Mais pourquoi as-tu choisi de nous parler de ça cette semaine ?
Le sujet est d’actualité un peu partout :
- En France, le gouvernement envisage de limiter le montant total du crédit à 300.000 euros et chaque participation à 250€. Mais cela ne s’applique qu’aux prêts et prise de participation au capital.
- Une loi américaine vient de permettre la vente d’actions à des investisseurs inconnus ayant pignon sur rue (qui gagnent plus de 200.000 dollars par an, ou qui valent un million de dollars) mais pas à n’importe qui, donc pas de vrai crowdfunding pour le moment.
- Le New Jersey s’apprête à étudier une proposition de loi qui permettrait de faire appel à tout le monde mais avec une limite (5.000 USD) par investisseur.
- Même la Grande Bretagne, dont la législation en est très souple, met en place un cadre sous le nom de Business Finance Partnership.
Au moment de lancer une consultation sur le sujet, le commissaire Michel Barnier se demande : « Avons-nous besoin d’un cadre européen unique pour aider ceux qui développent des plateformes de crowdfunding et réduire en même temps les risques de ceux qui ont recours à de telles plateformes pour financer des projets ? » Il pose bien les deux problèmes.
Quelle conclusion tires-tu de tout cela?
Il me semble que le crowdfunding — qui n’est pas autre chose qu’une application de la logique de participation facilitée par les TIC au financement de projets — va croître, prendre de multiples formes et susciter l’attention des législateurs quand il empiète sur le terrain des banques.
Ça nous concerne tous dans la mesure où il permet aux startups de trouver l’argent dont elles ont besoin sans avoir à se jeter dans la gueule des capital risqueurs / et où il rend réalisables toutes les créativités. Nous pouvons tous y faire appel et avons tous intérêt à en bien comprendre les mécanismes.
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Crédit photo : CC/Rocio Lara