Qu’as-tu vu dans ton voyage concernant la lecture sur les tablettes électroniques ?
Trois images me viennent à l’esprit :
- le nombre de gens qui s’en servent dans le métro de Moscou et dans les avions dans le monde entier ;
- la taille réelle des tweets chinois et l’implication sur la littérature sur mobile ;
- Yoza une application sud-africaine découverte à la conférence Netexplo (disclosure). Son slogan : “Lire, écrire et participer avec son Mobile”. Elle contient 31 nouvelles pour mobile, 18 poèmes, 5 œuvres de Shakespeare. Les utilisateurs commentent, votent, écrivent, critique et participent à des compétitions. Entre août et décembre 2012, il y a eu 575 000 lectures, 50 000 commentaires, 200 000 visiteurs uniques
Quel futur vois-tu pour le livre électronique?
J’en ai assez de cette question. On pouvait se la poser il y a dix ans, plus aujourd’hui. Nous en avons parlé plusieurs fois :
- Inéluctable et merveilleux : le livre électronique permet un accès plus commode à plus de textes pour moins cher …
- et de passer de l’ordinateur (pas commode) aux tablettes et même au mobile ;
- aujourd’hui, si j’ai le choix j’achète plutôt la version électronique, en tous cas en anglais en raison des prix pratiqués par les éditeurs français et espagnols ;
Comme toujours, le papier restera car il a ses vertus. Mais l’attachement au papier est comme un vieux vice dont on ne parvient pas à se défaire. J’ai toujours un carnet et un stylo sur moi. Mais j’ai pris toutes les notes de mon voyage sur mon ordinateur.
La question qui compte n’est plus, n’est pas le support sur lequel nous vivons mais l’écriture qu’il invite à utiliser et notamment ce que ça veut dire pour les journalistes…
Quels reproches fais-tu à l’écriture pratiquée par les journaux professionnels?
Qu’il s’agisse de Libération ou du Monde lu dans l’avion hier, j’aime le contenu, une grande partie du contenu MAIS… ils me tombent des mains. J’ai du mal encore à dire pourquoi, mais…
- au niveau du journal : on trouve trop de choses dans un même paquet ;
- au niveau de l’article : il y a trop de mots dont seule une partie m’intéresse et pas assez de repères pour trouver ce qui m’intéresse ;
- comme journaliste j’ai tendance à mettre ce que je crois important ;
- comme lecteur : je trouve qu’il y a beaucoup de scories et j’en veux moins.
Je suis convaincu qu’on a besoin de changer d’écriture. Et il ne s’agit pas seulement multimédia et hypertexte mais de rédiger différemment
Pourrais-tu être plus précis?
Pour le moment, j’ai retenu quatre éléments :
- les bullet points avec structure facile à lire (peut-être même outline avec les parties que l’on peut développer d’un click suivant les besoins
- les éléments du moment et du lieu qu’il faut prendre en compte, comme par exemple les articles sur hackers chinois, et le contexte est la décision du gouvernement américain d’envisager les cyber attaques préemptives. Deux exemples : le voyage d’Obama en Israël augmente-t-il les chances d’une attaque israélienne contre l’Iran ?Le plan pour Chypre augmente-t-il les chances d’un rejet populaire de la communauté européenne ? Souvent ces questions sont plus importantes que les faits… qui sont connus. Tout ça annoncé sur un seul écran a partir du quel on peut choisir
- La visualisation des éléments me semble fondamentale. Le lecteur va où il veut
J’ajoute deux éléments :
- Ce qui est fascinant c’est que tout ça est dans les bons journaux aujourd’hui mais que l’écriture reste celle de toujours. Gardons-là pour certains articles, reportages, vraies histoires qui le méritent…
- Il faut tenter bien sûr, faire des expériences. Je rêve d’avoir les ressources pour y travailler avec d’autres… mais j’ai peur qu’il faille attendre encore un bon moment. En France et en Europe du moins et j’aimerais bien savoir ce qui se concocte en Chine et au Japon où l’écriture ET le rapport à la technologie sont différents.
Billet publié sur l’Atelier des médias, émission de RFI