C’est ce que propose un tout récent article de Fast Company qui suggère aux entreprises de s’inspirer du Cartel de Sinaloa. Devin Liddell, spécialiste des stratégies de marques et professeur à l’École de concepts visuels de Seattle, y souligne que les organisations criminelles réussissent mieux que les autres quand on les mesure à l’aune de métriques traditionnelles dans le monde des affaires.
La marge nette des compagnies aériennes est de 1,8%. Celle des pétroliers est de 8%. Celle des grossistes de la cocaïne est de 93% (malgré les 51 milliards de dollars par an alloués à la « Guerre contre la drogue » par Washington).
Chaque employé à plein temps contribue avec 270 000 dollars aux bénéfices annuels de Google. Le montant est de 460 000 pour ceux d’Apple et de 20 millions pour chaque membre (150 selon Liddell) du Cartel de Sinaloa, une des plus grosses organisations mexicaines de trafic de drogue.
Le secret de cette performance économique repose sur trois caractéristiques qu’il conseille aux grandes corporations de copier.
- Une très forte culture d’entreprise. Les Yakuzas japonaises se conçoivent comme des « organisations chevaleresques ». Le cartel a « son credo et ses valeurs » et cultive son image populiste.
- Ces organisations sont « petites mais grandes », une façon de parler d’organisation en réseaux avec un certain degré d’autonomie distribuée. La Yakuza la plus importante – Yamaguchi-Gumi – compte 20.000 membres actifs répartis en 2500 entreprises et en 500 sous-groupes.
- L’improvisation – « une forme d’innovation » – y est un « un principe organisationnel », une attitude et non un processus comme dans les corporations. « Un trafiquant de drogue qui trouve un nouveau chemin à travers la frontière sait que les agents des douanes finiront par le découvrir », précise-t-il, « il a donc toujours besoin de trouver de nouvelles pistes », souvent au dernier moment. Dans une situation que l’on ne contrôle pas, c’est l’art de transformer une menace en opportunité.
Même les entreprises « agiles » encouragent rarement l’improvisation que nous pourrions définir comme de l’innovation à la volée. Il y a pourtant un marché.
Exemple parmi d’autres, le Washington Improv Theater offre des séminaires d’improvisation, notamment pour préparer les cadres aux négociations. Son slogan : « La révolution sera improvisée ».
Pour John Kao, professeur à la Harvard Business School, « L’improvisation est sans doute une des deux ou trois compétences cardinales que les entreprises devront acquérir dans le futur ».
Le Massachussetts Institute of Technology offre même un cours sur le sujet aux étudiants de sa prestigieuse Sloan School of Management.
Liddell n’a aucun doute sur les leçons organisationnelles qu’on peut tirer de son observation de la « pègre ». Si les trois points cités plus haut « n’ont pas l’air particulièrement criminels », c’est parce qu’ils constituent « une formule familière à certaines des meilleures marques légales du monde, de Apple et Nike à Virgin et Zappos ».
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crédit photo : Ascaf on/Flickr/CC