Il s’agit de BitTorrent, un programme P2P, Open Source, de partage de fichiers mis au point en 2001 par Bram Cohen, un hacker de génie (il se compare à Mozart à ses moments perdus). BitTorrent permet de télécharger très vite des fichiers de taille considérable comme peuvent l’être le système d’exploitation Linux, des jeux, des films ou des programmes de télévision.
Un nom qui parle
Le nom est bien choisi puisqu’il donne l’idée que les bits (unité de base de la digitalisation) circulent de façon torrentielle, ce qui correspond à peu près à la réalité.
Le programme transforme le fichier à transmettre en « hachis », c’est-à-dire en petits morceaux (entre un quart et un demi-Mo en général) qui ont une parcelle du fichier original et l’adresse d’un serveur (tracker) pour suivre la piste des fragments qui circulent en désordre sur l’internet. Il suffit ensuite de mettre cette information (appelée « torrent ») sur un site web pour que d’autres puissent en profiter.
L’originalité de BitTorrent (par opposition aux programmes populaires pour l’échange de fichiers musicaux comme Kazaa ou Gnutella) c’est que toute personne qui « descend » un fichier doit mettre sa capacité de monter de l’information à la disposition d’une autre.
Selon Wikipedia en français: « Le principe est très simple : Tout utilisateur (appelé leecher ou client) souhaitant télécharger devient à son tour un serveur pour les autres (c’est-à-dire qu’il partage ce qu’il a déjà téléchargé). Dès la totalité du téléchargement accomplie, il devient une source (appelé aussi seed) ».
[Commentaire en passant sur un autre problème du vocabulaire francophone des TIC : « télécharger » n’indique pas la direction de l’opération. En anglais on dit « download » quand on fait passer de l’information du réseau à un ordinateur, et « upload » quand on fait passer de l’info de l’ordinateur au réseau; d’où l’idée simple d’utiliser « descendre » et « monter » comme on dit « bajar » et « subir » en espagnol.]
« Donne et tu recevras »
La conséquence technique est évidente: plus il y a de gens qui téléchargent le torrent, plus il y a de capacité disponible. On évite ainsi le principal problème de la distribution sur l’internet qui est que dès qu’on a du succès le serveur s’engorge et plus personne n’a rien.
Socialement, cela résout le principal problème de la coopération qui est le plus souvent limitée par les « sangsues », ceux qui sont plus disposés à prendre qu’à donner. La formule préférée de Bram Cohen est au contraire : « Donne et tu recevras ».
Le succès de BitTorrent est considérable. L’an dernier une étude de la société britannique CacheLogic.com estimait qu’un tiers du trafic de l’internet était attribuable à cette technologie. Il s’agit sans doute d’une approximation exagérée. Wired Magazine estimait en janvier que plus de 20 millions de personnes avaient téléchargé (descendu) l’application et annonçait qu’au rythme du moment ils seraient 40 millions en 2006.
Le succès devrait encore grandir dans la mesure où une toute récente modification élimine la nécessité pour l’usager de faire référence aux trackers ce qui simplifie l’utilisation du programme.