Bonjour,

En ces périodes de bouleversements, la tentation de l’immobilisme est un danger. On la trouve chez Danone, en Israël-Palestine ou face à la demande de levée des brevets protégeant les vaccins anti-Covid. Elle va parfois trop loin, ce qui n’est pas toujours une mauvaise chose…

Du bon côté des résistances au changement

Un policier anti-émeutes sur les Champs Élysées le 8 décembre 2018 – Zakaria ABDELKAFI – AFP

Prenons trois exemples.

  • Actionnaires de Danone et patriarches – En mettant à la porte un PDG qui tentait de faire bouger le schmilblick dans son « entreprise à mission » les actionnaires de Danone disent en toutes lettres que leur profit est plus important que « sauver la planète ». Ce dernier point – qu’ils avaient approuvé comme objectif il y a quelques mois, ne peut se faire au détriment du premier. Pas un mauvais raisonnement, mais c’est surtout un prétexte commode pour faire passer à la trappe les efforts pour que la santé d’une entreprise prenne en compte toutes les parties prenantes – employés, fournisseurs, communautés locales, environnement et actionnaires – et pas seulement ces derniers. Les patriarches en ont profité pour reprendre la main sans faire trop de vagues /The Economist ou /Le Monde.
  • Bibi et le Hamas – Avec ou sans cessez le feu, la crise israélo palestinienne convient à Benjamin Netanyahou comme aux dirigeants du Hamas dans la mesure où elle a stoppé court la formation d’un gouvernement centriste avec participations de juifs et de musulmans religieux. Un pas en avant qui aurait cassé la vision de Bibi et l’aurait mis à portée de sanctions pour les cas de corruption dont il est accusé. Il aurait montré aux Palestiniens qu’il peut y avoir d’autres voix que la destruction d’Israël. Thomas Friedman l’explique clairement et s’inquiète du fait que cela pourrait préfigurer d’autres déceptions, y compris un retour de Trump… qui montre tous les jours sa capacité de contrôle du Parti Républicain. Les « immobilistes » sont capables d’aller très loin /NYTimes.
  • Des raisons à peine paradoxales d’être optimistes – C’est d’un article sur les violences de la police colombienne que me vient une petite poussée d’optimisme cette semaine /NYTimes. Il explique que les brutalités des « forces de l’ordre » qui vont facilement trop loin ces derniers temps, peuvent entraîner une prise de conscience plus large des problèmes. Qu’il s’agisse, au départ, d’une revendications contre une augmentation d’impôts (Colombie), du énième assassinat d’un Africain-Américain par un flic, ou d’une augmentation des tickets de métro (Chili), des affrontements ont transformé des protestations limitées en mouvements de masse. Le sort de George Floyd a marqué un moment dort dans l’histoire de la lutte contre le racisme aux États-Unis, sans parler de ses répercussions internationales. Les manifestations chiliennes ont entraîné le lancement d’un processus électoral pour rejeter la vieille constitution imposée par Pinochet et en élaborer une nouvelle /fr.Wikipedia.

Pourquoi c’est positif – Toute action en faveur de changements entraîne des résistances. Que celles-ci ne puissent aller trop loin sans renforcer le courant qui les pousse est une source d’espoir.

Vaccins pour la planète – Un pari à prendre

Photo by Tim HUFNER – Unsplash

A en croire les médias les mieux intentionnés, et même quelques dirigeants, lever provisoirement les brevets sur les vaccins contre le Covid serait, certes, une belle idée mais insuffisante et difficile à mettre en oeuvre. Résultat : nos biais de confirmation passent à la vitesse supérieure. Nous sommes « plutôt pour » ou « plutôt contre » suivant des opinions déjà faites et ne nous prononçons pas. Un désintérêt dangereux.

Problème – Les pays riches vaccinent leurs populations. Les gens continuent à mourir dans les pays pauvres et cela peut durer plusieurs années. Les inégalités augmentent. Pour accélérer la sortie globale de la pandémie une levée temporaire des brevets sur les vaccins est envisagée. Pas si facile disent les gros labos pharmaceutiques et leurs défenseurs : il faut préserver l’appât des bénéfices pour encourager l’innovation. De plus, disposer des brevets ne suffit pas, il faut avoir les outils et le savoir faire pour produire les vaccins.

Réponses – Pur les tenants d’une levée temporaire de la propriété intellectuelle, les labos ont déjà reçus des milliards des États. De plus, un nombre important de pays pauvres ont la technologie, notamment du fait qu’ils produisent des vaccins pour nous. C’est le cas de l’Inde et de l’Afrique du sud, par exemple /ProjectSyndicate

Un pari – Toute semaine de retard se traduit par plus de morts et cela menace de durer des mois, voir des années. L’affrontement des deux camps peut durer plus longtemps encore. Pas une raison pour ne rien faire. « L’écologie de l’action » explique Edgar Morin, tient compte de « l’erreur, l’illusion, l’incertitude et le risque […] Toute décision est donc un pari ». Nous demander une illusoire certitude avant de faire un choix est le meilleur moyen de nous condamner, en douceur, à l’inaction, même si elle est meurtrière /Les Échos.

La cybercriminalité la plus rentable en 4 mots

En pleine expansion – Les difficultés récemment connues par l’approvisionnement en essence de la côte ouest des États-Unis ne sont qu’un épisode dans un type de crime en pleine expansion.

L’opération consiste à bloquer l’accès à des données importantes d’une personne ou d’une entreprise et à ne les restituer qu’en échange d’argent. Le travail est fait par des programmes informatiques généralement appelés rançongiciels (pour ne pas dire « ransomware » de « ransom » et de « -ware » comme dans software et dans hardware).

Pourquoi c’est grave – Parce qu’il s’agit du « modèle économique le plus rentable de la cybercriminalité ». Il repose sur l’omniprésence de réseaux non sécurisés et sur le recours au paiement par crypto-monnaies, non contrôlables par les gouvernements. Conclusion d’un des spécialistes les plus respectés de la cybersécurité : « tant que nous n’aurons pas résolu ces deux problèmes, cela ne changera pas » /Bruce Schneier.

Being a part of a history does not necessarily lock you into any one particular future. – Anthony Romero

Faire partie d’une histoire ne vous enferme pas nécessairement dans un futur particulier.