Attaqué personnellement pour son rôle dans la vision « utopiste » de Twitter et de l’internet, Clay Shirky répond dans le numéro suivant. Au total ils ont eu droit à deux articles chacun (Morozov 2 et Shirky 2 ).
Shirky concède sans difficulté que les protestations de novembre 2009 en Iran n’ont pas pu être déclenchées par les médias sociaux type Twitter (ni par les téléphones mobiles pourtant plus importants). La source en est la volonté des gens, « the willingness of the people to defy their government. » Ceci dit, le point central n’en est pas moins que « just as the Protestant Reformation was shaped by the printing press, the Iranian insurrection was and is being shaped by social media. » Les TIC, comme d’autres technologies, forment les mouvements qui s’en servent.
Son credo demeure que « the spread of mobile phones and internet connectivity will reshape that civic life, changing the ways members of the public interact with one another. »
Le gouvernement se sert des TIC pour réprimer, mais « even taking into account the increased availability of surveillance, the net value of social media has shifted the balance of power in the direction of Iran’s citizens. » L’équilibre du pouvoir a changé.
L’argument de fond, connu de longue date, reste pour Shirky que si l’Iran peut bloquer les communications, le temps d’une manifestation (un modèle qu’il qualifie de « temporary Burma »), il est peu probable qu’il parvienne à fermer complètement le pays pendant longtemps.
C’est pourquoi le cas iranien est si important. « As usual, the state has more power than the insurgents, but the insurgency has nevertheless achieved the transition from distributed but uncoordinated discontent to being an actual protest movement, and part of that transition was achieved with these tools. » L’état a plus de pouvoir mais les protestataires, hier atomisees, sont devenus un mouvement
Tout n’est pas dit pour autant.
Nancy Scola de TechPresident, par exemple, reproche aux deux compères d’ignorer l’impact sur la démocratisation quotidienne, sur l’ouverture des sociétés.
Il faut aller plus loin. La réflexion est utile mais le problème est mal posé parce qu’il part, sans le dire, d’une prétendue « nature » des technologies de l’information qui serait ainsi « bonnes » ou « mauvaises ».
Leur plus grand mérite, d’un point de vue social et politique est d’ouvrir de nouveaux espaces d’affrontements sur lesquels les puissants peuvent jouer de leurs atouts traditionnels mais à condition de les déployer de façon innovante. Les contestataires, de leur côté bénéficient souvent du fait qu’ils peuvent les occuper de façon plus agile et y tirer partie de nouvelles opportunités dans des champs non encore définis.
Qu’en pensez-vous?
[Photo FLickr de Oscar Espiritusanto ]