longtail-curve.jpgThe Long Tail (La longue traîne), le livre de Chris Anderson que j’ai déjà évoqué (voir ici) explique avec une grande simplicité comment la technologie permet un glissement des marchés de masse aux marchés de niches, en rendant profitables des ventes en toutes petites quantités qui jusqu’à présent de l’étaient pas. C’est ainsi qu’on passe d’une culture de l’uniformité à une culture de la diversité.

J’ai beaucoup apprécié ce livre. Il a la double vertu de nous ouvrir les yeux à certaines dimensions économiques et culturelles de w2. Bien construit et bien documenté, il est aussi un des rares bouquins issus d’un article de magazine qui tienne vraiment la route.

Expression imagée, la longue traîne se réfère à une formule économique vieille de plus d’un siècle qui montre que dans toute population 20% des individus bénéficient de 80% des richesses, que dans tout marché 20% des produits attirent 80% des acheteurs (en gros). C’est particulièrement vrai pour les produits culturels: plus de trois quarts des ventes correspondent à un tout petit pourcentage des titres de livres ou de disques en circulation.

Dans un grand magasin, par exemple on ne trouve qu’une infime partie de tous les types de produits, ceux qui sont de nature à satisfaire le plus grand nombre de clients. Mais la raison ne se trouve pas, nous explique Anderson dans une quelconque loi de la nature. Elle s’explique par des goulots d’étranglement que l’internet libère.

Il permet de gagner de l’argent en vendant un nombre suffisant de produits qui n’intéressent qu’un nombre restreint de personnes. Ainsi Rhapsody, site de musique online, gagne plus d’argent en vendant une fois ou deux par mois les centaines de milliers de titres qui ne figurent pas parmi les 10.000 les plus populaires qu’en vendant ces derniers. On retrouve les mêmes proportions pour tous les produits strictement digitaux pour lesquels les frais de reproduction, stockage et transport sont très proches de zéro. Le principe s’applique (de façon moins éclatante) aux entreprises commerciales qui, telle Amazon, utilisent l’internet pour réduire leurs coûts de stockage et de transport.

Dans la courbe représentant la distribution des ventes, la partie gauche qui monte très haut (la tête) représente traditionnellement le petit nombre de best-sellers alors que sur la droite on voit une longue traîne représentant un grand nombre de titres qui se vendent à très peu d’exemplaires. La révolution introduite par l’internet c’est qu’on peut gagner beaucoup d’argent en vendant aussi bien les produits qui se trouvent à la traîne (plus longue encore qu’on ne l’imagine) que ceux qui sont dans la « petite tête » (en anglais ils disent « short head »… mais j’ai pas pu résister).

Les implications sociétales et culturelles sont encore plus grandes. D’une culture façonnée par la production de masse nous passons à un marché de niches, à une « explosion de diversité ».

La diversité paye, puisque les niches sont rentables.

C’est ça qui me paraît le plus important. Mais Anderson parle surtout de « l’économie d’abondance » (le sujet de son dernier billet sur son blog) que j’aborderai demain.

A suivre…

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...