Petites questions pour l’été (et pas seulement) : la ville n’est-elle pas aussi un média ? Quels éclairages cela peut-il nous apporter de la considérer sous cet angle ?
· La question se pose, en partie, du fait du rôle croissant des technologies de l’information et de la communication (TIC).
· Elles sont déterminantes dans l’utilisation du terme « ville intelligente » par IBM, Cisco et quelques autres pour désigner une ville bardée de technologies (fournies par elles).
· Les critiques s’étant multipliées il est de bon ton aujourd’hui d’insister sur la participation citoyenne (quitte à ne pas insister sur ce que cela veut dire concrètement) et de chercher d’autres termes comme ville « vivante », « durable », « connectée » ou même « sage » tout en continuant d’avoir recours aux mêmes outils.
Quel que soit l’usage qu’elles en font (pour recueillir des données et/ou pour permettre aux citoyens de participer) les villes se dotent d’outils ubiquitaires de communication. Cela passe par l’infrastructure qui repose de plus en plus sur le haut débit par fibre optique ou par 4G, l’internet des objets qui s’envoient des messages sans arrêt et les citoyens qui accèdent à l’information d’où qu’ils se trouvent et qui communiquent entre eux directement ou par l’intermédiaire des réseaux sociaux.
· Cela veut dire que tout le monde ou presque peut s’informer ou communiquer en permanence ce qui pousse autorités et institutions à fonctionner dans une transparence croissante.
· Citoyens, entreprises et municipalités deviennent sources d’informations qui sont accessibles par tous et par toutes. Manuels Castells disait déjà il y a vingt ans que ce type de flux comptait autant que ceux de personnes ou de marchandises dans les dynamiques spatiales.
· C’est pour ça qu’il semble légitime d’envisager la ville comme un média, c’est à dire comme un dispositif technique et social de production et d’échange d’informations.
Quelles sont les implications d’une telle lecture ?
C’est là qu’il faut travailler, creuser, réfléchir. Il me semble que cela ouvre au moins deux portes :
· La gestion et l’approche de l’information dans les villes, de sa circulation, des droits et des devoirs qui y sont attachés peut être abordée en tenant compte de ce que nous savons des médias et de la communication. Cela invite probablement à poser différemment la question des libertés, notamment d’expression.
· La ville elle-même devient un défi pour les médias traditionnels qui ont tendance à ne chercher la compétition émergente que chez les producteurs traditionnels d’information (même quand ils utilisent des technologies nouvelles). Ils ne se trouvent plus devant quelques émetteurs identifiables mais devant un système de production et de circulation de l’information multidirectionnel.
Autant dire que le rôle croissant des TIC telles qu’elles fonctionnent aujourd’hui nous pousse à voir la ville comme un média interactif et non plus hiérarchique ce qui devrait nous pousser à revoir la façon dont la vie politique y est menée.
Cet article a été publié par L’Opinion le 17 juillet 2015.