Peu connu du grand public, Rob Curley est peut-être l’une des personnes qui fait le plus bouger la presse. Il lui redonne espoir en montrant qu’elle peut attirer les lecteurs online, qu’elle peut être « cool » et profitable. Après en avoir fait la preuve dans une série de journaux locaux au Kansas où il est né, puis en Floride il vient de débarquer dans la capitale du pays où ses premiers pas ont déjà fait des vagues.

« C’est l’information qui compte et pas le mécanisme de distribution » a-t-il commencé par expliquer lors d’une conférence qui s’est tenue le 27 mars à l’école de journalisme de l’Université de Californie-Berkeley. Mais l’essentiel, aujourd’hui comme hier, demeure la relation avec les lecteurs. Il y a trente ans policiers, pompiers et maîtres d’écoles lisaient le Washington Post. Ça n’est plus le cas et c’est ce qu’il faut retrouver.

Tout son pari est là. Et pour y parvenir il compte sur des nouvelles hyperlocales et des multimédias hyper inventifs.

La nouveauté que lui permet la technologie c’est de mettre une quantité considérable d’informations dans des bases de données et de les transformer en service pour ses lecteurs. A Lawrence , au Kansas, il a mis tous les noms de tous les gamins de toutes les équipes scolaires de baseball. Les fans peuvent comparer joueurs et équipes. Le journal envoie  des SMS aux parents qui le souhaitent sur les matchs annulés au dernier moment ou les scores, toutes les dix minutes.

A Naples , en Floride il a fait un guide des restaurants . Ça permet, entre autre, de savoir (sur son portable) comment trouver du sushi à 2h du matin. Il a aussi créé un guide des églises. Les sermons sont retransmis en MP3.

Tout ce qu’il fait est « indépendant de la plateforme » c’est-à-dire qu’on peut le voir sur iPod, téléphone portable ou n’importe quelle console de jeux.

« On ne fait jamais trop de multimédia » ajoute-t-il. Podcasts, vidéo, flash, tout y passe. Mais tout est intégré avec un soin graphique extraordinaire. Tout est « cool », re « cool » et archi « cool ». Et tout doit l’être. Ça lui a permis de lancer une sorte de station télé locale avec les gens du coin et les moyens du bord, mais avec un designer graphique arraché à prix d’or aux grandes boîtes de pub de New York.

« Les nouveaux médias doivent engager les meilleurs car ils sont en compétition avec Google qui engage les gens les plus intelligents du monde, » ajoute-t-il en souriant. En échange de quoi il augmente considérablement la rentabilité de la partie online.

En 3 ans il a fait passer le trafic sur le site du quotidien de Lawrence (20.000 exemplaires vendus dans une ville de 82.000 habitants) de 500.000 pages vues par mois à 13 millions.

A Naples « capitale mondiale des retraités » selon lui, il est arrivé à susciter tellement d’enthousiasme parmi les annonceurs locaux que certains se sont engagés à des campagnes d’un million de dollars (c’est une ville riche).

Trafic et revenus avec un style cool. Il a compris quelque chose qui nous échappe encore. Engagé par le Washington Post-Newsweek Interactive à la fin de l’an dernier, il y fait déjà sentir sa pate avec « On Being  » une série d’interviews ultra simples qui attire plus de visiteurs à elle seule que tous les produits vidéo du reste de la compagnie pris ensembles.

[Photo de JD Lasica]

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...