mpedigree.1297071455.png Le Forum Netexplorateur ( organisé par Martine Bidegain et Thierry Happe) qui s’est tenu la semaine dernière au Palais de l’UNESCO à Paris a permis de jeter un coup d’œil privilégié sur innovation et changements de par le monde. Une occasion pour se poser quelques bonnes questions.Côté projets innovants j’ai apprécié Obami un site de réseaux sociaux pour les écoles d’Afrique du Sud; Lewatmana , un site de crowdsourcing des informations sur la circulation dans la ville de Djakarta et le ghanéen mPedigree , qui permet à tout un chacun de vérifier si les médicaments qu’il se propose d’acheter son légitimes. Pour comprendre son utilité il faut savoir qu’en Afrique 30% des médicaments mis sur le marché sont des contrefaçons parfois mortelles. Il y avait même du marketing poétique avec iButterfly qui n’est accessible qu’aux seuls japonais propriétaires d’iPhone. Ça vaut quand même le coup d’œil.

Parmi les discussions j’ai, hélas, retenu d’abord celle qui ne m’a pas plu. Il était question de l’impact des nouveaux médias et des réseaux sociaux sur les révolutions égyptienne et tunisienne. J’ai beaucoup aimé Cohn-Bendit que je n’avais pas vu en live depuis 1968 (je jure) et Pierre Haski, mais je reproche au groupe de n’avoir pas su poser la question la plus importante qui est celle du pouvoir.

Il ne fait aucun doute que les nouveaux médias permettent de faire connaître l’existence d’un mouvement populaire dans un pays où l’info est censurée. Il ne fait pas de doute qu’ils peuvent permettre un début d’organisation sans organisation (se retrouver sur la place Tahrir, par exemple). Mais quand on parle de politique on parle toujours, en dernière instance, de la question du pouvoir. Quel que soit le moyen (démocratique ou pas, violent ou pas), le pouvoir ça se prend. Il n’est pas prouvé que les réseaux sociaux peuvent le permettre. J’ai même de sérieux doutes à ce sujet. Une mobilisation peut sans doute conduire au départ d’un dictateur (voir ce qu’en disait Clay Shirky la semaine dernière). La prise du pouvoir c’est une autre paire de manches.

Le débat sur le management dans la société digitale m’a amené à me poser une question sur l’utilisation de la notion de génération (quelle que soit la lettre qu’on y accole). Elle a pour moi le défaut majeur d’ignorer les différences entre les jeunes (riches, pauvres, ruraux, urbains et surtout leurs différence d’un continent à l’autre, d’une culture, d’un niveau de développement à l’autre).

La réserve la plus sérieuse tient à ce qu’elle se situe par définition dans une référence au temps caractéristique de la modernité, de cette saison de l’humanité pendant laquelle tout était axé autour de la notion de temps et où nous croyions encore, massivement, au progrès.

Nous sommes passés à l’ère de la globalité. A côté du comment, toujours essentiel, le « quand » compte moins que le « où ». C’est la géographie qui marque les différences encore plus que l’histoire même si les deux sont inextricablement liées.

Vous me direz si vous partagez ce sentiment. Mais il était inévitable, précisément dans cette conférence où l’on s’est attaché à nous montrer avec succès que l’innovation et le changement ne sont pas des privilèges nord-américain ou européen.

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...