Pentagrowth : les 5 leviers de croissance des entreprises qui réussissent

Nous admirons les réussites d’AirBnB, Netflix ou Tesla sans bien les expliquer. Il aura fallu un livre (déjà vieux puisqu’il est de janvier 2009) pour connaître La méthode Google. Mais nous manquons de synthèse expliquant le succès des nouvelles venues.

Le Catalan Javier Creus (@javicreus) et son entreprise IdeasForChange.com s’y sont attaqués et en ont tiré « un modèle qui identifie les 5 leviers de la croissance exponentielle » : le Pentagrowth. Jolie formule dont on aurait tort de se méfier. C’est un outil d’analyse forgé sur l’étude de 50 entreprises digitales ayant connu une croissance de plus de 50% (en clients et revenus) entre 2008 et 2012, c’est à dire en pleine crise.

Pour actionner ces 5 leviers il faut :

  1. établir des relations avec (et entre) clients, utilisateurs, partenaires, ressources etc. (Connect);
  2. accroître son inventaire, ses ressources sans les centraliser (Collect);
  3. donner du pouvoir à toutes les composantes du dispositif (empower);
  4. permettre aux partenaires d’intervenir aussi librement que possible (Enable);
  5. partager les connaissances (Share).

Connecter est essentiel dans la société en réseau. Plus un dispositif compte de « nodes » (traduction habituelle, le mot nœud indique un blocage alors qu’il s’agit d’un embranchement), plus ceux-ci – personnes ou objets – ont de liens entre eux, plus le réseau a de valeur. Spotify s’est appuyée sur Facebook pour tirer parti du potentiel de centaines de millions d’utilisateurs connectés.

L’art consiste ensuite à réunir sans effort tout ce sur quoi l’entreprise peut compter, ce que font les plateformes. AirBnB permet aux chambres ou appartement que leurs propriétaires souhaitent louer, et aux voyageurs qui en ont besoin de se retrouver en un même lieu virtuel. L’inventaire est distribué.

Paradoxalement pour la pensée traditionnelle, le pouvoir accordé aux utilisateurs (le choix dans leurs façons d’intervenir) rend l’entreprise efficace et dynamique. Ceux qui collaborent à Wikipedia, un des sites les plus visités du monde, peuvent choisir 17 fonctions différentes. Plus les partenaires sont nombreux à pouvoir accéder au dispositif d’ensemble et plus ils trouvent intérêt à le faire (ce qui implique de leur concéder une certaine marge d’autonomie) plus le tout devient puissant.

Reste à partager les connaissances et les rendre accessibles pour que chacun puisse les utiliser en fonction de ses besoins. Exemple récent, que m’a rappelé Creus : « Tesla [qui met ses brevets pour voitures électriques en open source] considère qu’il est préférable d’avoir une portion moindre d’un marché auquel contribuent différents fabricants qu’une portion plus grande d’un marché qu’elle devrait développer avec ses seules ressources ».

L’impact de ces cinq leviers tient au recours croissants aux réseaux et aux plateformes. Le premier terme est connu. Le second se réfère à des espaces virtuels où les fournisseurs exposent ce qu’ils peuvent « offrir » et les utilisateurs viennent chercher ce dont ils ont besoin. « Les plateformes remplacent les capacités internes financées avec des ressources propres par des capacités de l’écosystème auxquelles l’accès est libre et que l’entreprise alimente elle aussi », m’a expliqué Creus par mail.

Les synergies complexes ainsi rendues possibles permettent de faciliter les interactions entre éléments, d’augmenter l’étendue de l’impact de l’entreprise et d’intéresser tout le monde à sa résilience (terme important dont j’ai parlé récemment). Il s’agit, selon Creus et son équipe de « principes génératifs de croissance ». J’y vois aussi le développement d’attitudes différentes. C’est sans doute là que la révolution culturelle, en cours dans l’entreprise au niveau mondial, est en train de se jouer.

Élégamment, Creus parle de « concurrence entre écosystèmes entrepreneuriaux » différents dont il croit qu’elle remplace celle qui poussait les entreprises à s’affronter entre elles. Les nouvelles façons de penser et d’agir sont apparues d’abord comme de petits coups de ciseaux. Nous avons maintenant affaire à une authentique coupure et à l’apparition d’un fossé que les passerelles ne permettent plus de franchir. Il faut passer de l’autre côté.

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Crédit photo : Andy Lamb/Flickr/CC

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...