J’ai déjà parlé du débat organisé le 15 avril sur « Qui paiera pour un journalisme d’excellence dans le futur ? » Ce premier billet essayait de montrer comment, pour les participants, le marché tendait à tuer le journalisme de qualité pour le remplacer par du divertissement.

Pour Dan Gillmor, auteur de « We The Media », un livre sur le « journalisme citoyen » la technologie peut contribuer à la solution à condition d’être en prise sur la société. Il croit par exemple que certaines formes de journalisme d’investigation peuvent se faire en s’appuyant sur les modèles « distribués » que permet l’internet : « Un des enjeux, dit-il, c’est de décomposer l’enquête en tous petits morceaux pour ensuite les réunir ».

Craig Newmark, fondateur de la Craigslist (qui menace sérieusement les journaux traditionnels avec ses sites d’annonces gratuites présents dans 100 villes de 20 pays) semble croire dans ce modèle. « Le journalisme de participation (participatory journalism) marche mieux » a-t-il déclaré. « Un de ces jours nous allons atteindre un point d’inflexion. Dans cinq ans peut-être. Et ça sera un gros truc. »

Cette participation citoyenne, rendue possible par la technologie, n’a pas encore trouvé son modèle économique. Mais elle repose sur des motivations qui échappent en partie aux lois du marché.

Produit, service ou relation ?

« Le journalisme original, qui prend du temps, exige patience et savoir-faire et n’est pas surdéterminé par un point de vue antérieur aux résultats de l’enquête, » estime Katherine Fulton, ancienne journaliste présidente du Monitor Institute. C’est particulièrement vrai au niveau local.

La réponse est peut-être dans le mécénat ajoute Fulton qui vient de publier un livre sur le futur de la philanthropie: « Nous nous dirigeons peut-être vers un monde dans lequel le grand journalisme devient quelque chose comme du grand art ». Le financement viendra alors des fondations, des mécènes et d’organisations à buts non lucratifs. En termes économiques, la différence tiendra à ce qu’il sera financé indirectement et non directement.

Plus au fond, Fulton se demande si l’actualité – « the news » – est « un produit ou un service ».

L’émergence du journalisme citoyen invite à se demander si elle ne devient pas une relation.

Sandy Close, directrice de Pacific News Service travaille beaucoup avec les jeunes délinquants et les médias des nombreuses minorités ethniques présentes dans la région de San Francisco et aux États-unis. Elle insiste sur le dynamisme de ces groupes sociaux, leur intérêt pour la communication « qui remplace les communautés » et en particulier pour les médias qu’ils produisent eux-mêmes. Le problème est donc, selon elle, une question de « texture relationnelle ».

Les technologies de la communication peuvent contribuer à cette évolution qui ferait passer les « news » de produit, à service, à relation.

Mais si Édouard Glissant nous a magistralement sensibilisé à la poétique, voir à la politique de la relation, personne ne semble encore savoir de quoi serait faite une véritable « économie de la relation ».

Des idées ?

J’enquête, je suis et j’analyse les technologies de l’information et de la communication depuis la préhistoire (1994). Piqué par la curiosité et l’envie de comprendre ce que je sentais important,...